Patrimoines
Les mégalithes dans le Lot
Mégalithe signifie grande (megas) pierre (lithos) en grec. Il s'agit donc d'un monument constitué d’une ou plusieurs pierres de grandes dimensions, érigées (ou levées) par les hommes.
Les mégalithes du Quercy
L’importance du Quercy, région charnière entre le monde atlantique et le monde méditerranéen, dans le mégalithisme français a été souvent soulignée. Ces premières architectures de pierre édifiées par l’homme autour de 3 500 ans avant notre ère dans notre région, durant le Néolithique moyen, sont en effet un élément identitaire fort du paysage. Plus de 600 dolmens et une vingtaine de menhirs sont présents sur les causses du Lot, densité qui fait de ce département l’un des plus riches de France en mégalithes.
Les dolmens ont été fréquemment réutilisés aux époques ultérieures, un certain nombre d’entre-eux servant encore, il y a peu, d’abris de fortune aussi bien aux bergers qu’à leurs troupeaux, voire au stockage de matériel agricole ou de dépotoirs ...
Dolmen du Pech Laglaire 2 à Gréalou
Les menhirs pouvaient à l’origine être beaucoup plus nombreux dans le Lot, comme semble l’attester la réutilisation de certains comme table de couverture de dolmens ou la présence récurrente de lieux-dits évocateurs tels que "Peyro Lebado". Mais ces « pierres dressées » ont cependant été souvent « abattues » à diverses époques, notamment en représailles des croyances païennes ou diaboliques qui y étaient associées. Les connaissances actuelles ne permettent pas d’appréhender la fonction de ces menhirs datés traditionnellement comme contemporains des dolmens.
Dolmen du Pech Laglaire 2, commune de Gréalou
Menhir de Belinac, commune de Livernon
Dolmen des Combes Hautes à Marcilhac-sur-Célé
C'est quoi un dolmen ?
Anatomie d'un dolmen
Le terme dolmen est issu du breton dol -table - et men - pierre. Il désigne un monument funéraire fait d’une chambre sépulcrale bâtie de grandes dalles et d’une construction de pierre appelée tumulus englobant le caveau mégalithique. Les dolmens, aujourd’hui pour la plupart ruinés, avaient donc un tout autre aspect à l’époque préhistorique.
Dans le Lot, le type le plus fréquent est le dolmen dit simple ou caussenard. La chambre mégalithique y était le plus souvent limitée à deux dalles latérales, les orthostates (montants), une dalle de chevet, généralement encastrée entre les orthostates, et une dalle de couverture, où l’accès à la chambre sépulcrale se pratiquait par une ouverture aménagée préférentiellement au sud-est. Un couloir d’accès ou un vestibule pouvait parfois précéder le caveau.
La chambre funéraire était englobée dans un tertre de pierres et de terre. Les dernières recherches archéologiques ont permis de révéler que la chambre était intégrée dans un cairn allongé, de forme trapézoïdale, de dalles calcaires. Un tumulus circulaire de terre et de pierres venait ensuite recouvrir totalement le monument pour le condamner.
Fouille archéologique dans la chambre funéraire d'un dolmen lotois © Vincent Ard
Des monuments pour les morts
Les dolmens contiennent des sépultures collectives et/ou successives. Les défunts étaient inhumés. Les ossements forment souvent un inextricable enchevêtrement, résultat d’une réduction des squelettes ou de déplacements pour l’accueil de nouveaux défunts. Toutes les catégories d’âge ne sont pas représentées, en effet les jeunes et très jeunes sujets y étant souvent absents. Par ailleurs, l’espace funéraire pouvait être divisé pour recevoir les restes de groupes familiaux ou sociaux distincts. Les mégalithes étaient en fait réservés à une partie de la population dont il faut peut-être entrevoir l’importance du statut à travers la monumentalité des dolmens.
Dans les chambres sépulcrales, les défunts étaient accompagnée d'un mobilier funéraire varié, témoignant d’un profond respect des morts et d’une croyance en un au-delà : céramiques, pointes de flèches, lames de silex, parures variées, offrandes alimentaires... Le musée du Pech Merle à Cabreret ainsi que le musée Henri Martin à Cahors présentent des collections de mobiliers néolithiques.
Comment étaient construits les dolmens ?
Conservation et valorisation des dolmens du Lot
Dolmen des Cloups à Ginouillac
Un patrimoine fragile
Plusieurs études sanitaires ont été réalisées dans les années 2000-2010, à l’initiative des services de l’État et des collectivités, sur un échantillon représentatif de monuments mégalithiques du Lot. Ces enquêtes ont permis d’identifier l’impact des facteurs bio-climatiques sur leur dégradation et de pointer le rôle majeur de l’homme dans la lente érosion de ce patrimoine. Aux tumuli arasés, voire détruits, s’oppose un monument central à ossature de pierres qui a mieux résisté mais est désormais également menacé de disparition : effondrées, érodées, renversées, nombre de chambres sépulcrales, excavées par des fouilles anciennes, sont irrémédiablement détruites.
Cet état de fait n'est malheureusement pas récent, il était déjà pointé aux 19e et 20e siècles par des érudits locaux :
- "les pluies, les vents ou la main des hommes font disparaître de jour en jour ces monuments d’une époque déjà si éloignée de nous" (Glück, 1852).
- Les "marchands de pierre du pays les démolissent pour avoir la pierre à bon marché et la vendre cher" (Garrigou et Duportal, 1869).
Opération archéologique à Gréalou
... à protéger !
L’intérêt patrimonial et scientifique des mégalithes quercinois a très tôt été une évidence. Nombre d’entre eux sont protégés au titre des Monuments Historiques dès 1889, et près d’une cinquantaine bénéficient aujourd’hui de cette reconnaissance. La loi de 1913 reste cependant insuffisante pour leur assurer une réelle protection physique. Les Collectivités territoriales et l’État s’engagent aujourd’hui vers des projets de conservation et de valorisation afin d’apporter un nouveau regard sur ces monuments.
Cette démarche ne saurait cependant être effective sans le respect de chacun pour ces premières architectures de pierre. La majorité des dolmens lotois ne sont pas protégés au titre des Monuments Historiques et appartiennent à des propriétaires privés. Il revient donc aux habitants dépositaires de ce patrimoine exceptionnel de le préserver ; et aux visiteurs et autres curieux de respecter ces sépultures vieilles de plus de 5 000 ans.
Carte des dolmens classés monuments historiques dans le Lot
Elsa Labbé-Lavigne, 2025, d'après un livret Parc naturel régional des Causses du Quercy, 2010, avec la participation de Mireille Leduc et Christian Servelle, ingénieurs d’études à la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Midi- Pyrénées, Service régional de l’Archéologie et Eric Labastie, archéologue à la Cellule départementale d'archéologie du Lot.